18-20 juin 2025 Paris (France)

Argumentaire

L'essentiel:

         Alors que la ville de Canterbury vient d’ériger une statue en son honneur et que voit le jour une nouvelle édition des œuvres complètes d'Aphra Behn, le moment paraît propice pour réinterroger la place de Behn et de son œuvre dans la critique et dans l'imaginaire collectif. À l'opposé d'une Behn statique, loyale à un imaginaire Tory conservateur, ce colloque propose ainsi de placer la réflexion sous le signe du mouvement, de la mobilité, du décentrement et de l'innovation.

        Le colloque est itinérant et se déroule dans 3 lieux différents du centre de Paris:

- la première journée (18 juin 2025) se déroule à l'université Paris Cité à partir de 13 h 00 (Amphi P.-G. de Gennes, bâtiment Condorcet): 4 rue Elsa Morante, 75013, Metro: Bibliothèque François Mitterrand.

- la seconde (19 juin) a lieu à Sorbonne Université (en Sorbonne, salle des actes; 17 rue de la Sorbonne, 75005 Paris. Métro: Saint-Michel, Odéon, Cluny.

- la dernière (20 juin) à l'université Sorbonne Nouvelle (s. C405, site Nation): 8 avenue Saint-Mandé, 75012, Metro: Nation.

Argumentaire: 

         Aventure ou fuite, la mobilité est chez elle d'abord spatiale. Parmi ses pièces les plus célèbres, The Rover (1677) porte le mouvement et l'errance dès son titre : le héros est un royaliste exilé, sans lieu, mobile par contrainte autant que par choix. Nombre de pièces et de romans invitent le spectateur à déplacer le regard vers l'ailleurs, à envisager d'autres espaces : l'Espagne et l'Afrique avec Abdelazer (1676), les Pays Bas avec The Dutch Lover (1673) et The History of the Nun (1689), le Nouveau Monde avec Oroonoko (1688) et The Widow Ranter (1690), voire la Lune et le cosmos avec The Emperor of the Moon (1687) et A Discovery of New Worlds (1688), sa traduction du best-seller de Fontenelle. Si cet ailleurs fantasmé permet surtout, en dernière instance, la critique d’un ici, Behn fut elle-même une grande voyageuse, de la France et des Flandres au Surinam. Ce même goût du décentrement, linguistique autant que géographique, anime son activité intense de traductrice et d’autrice.

 

         Dans son œuvre, la mobilité spatiale va volontiers de pair avec une mobilité sociale. La sortie de son lieu, l’excursion (parfois temporaire) hors de sa condition économique et sociale, voire sexuelle, sont des thèmes très présents chez Behn, du personnage du parvenu à celui du commerçant colonial – même si ces personnages ne sont pas toujours dépeints avec indulgence. On pense par exemple à Angellica Bianca, charismatique courtisane qui, rendue folle de rage par le dépit amoureux, en vient à tenir en joue son amant dans The Rover, à l’opposé des idéaux féminins de modestie et de contrôle de soi ; ou à Oroonoko, prince africain arraché à son Afrique natale pour être réduit en esclavage au Surinam. Behn elle-même semble avoir été le produit de cette mobilité, de son Kent natal à son intégration au monde social et économique très masculin du Londres littéraire et du milieu interlope du théâtre.

 

         La complexité générique et formelle des textes et les multiples influences dont ils témoignent se traduisent enfin par une mobilité des textes eux-mêmes, qui font une large place à l’hybridité et à l’inventivité thématique et formelle. Les questions de la représentation, de l’innovation générique et de la dramaturgie sont ici centrales à la réflexion. Pour le théâtre, on pourra s’intéresser à l’art de l’acteur et de l’actrice ainsi qu’aux innovations plus formelles – variations sur la figure du « rake », réflexion sur l’agentivité féminine, travail sur la vitesse, l’intonation ou le rythme… – ou techniques : décors coulissants pour ménager les révélations, expérimentations sur les scènes de groupe et les déplacements… Dans la fiction, l’hybridité générique permet à Behn d’emprunter au genre épistolaire, à l’écriture historique, à la fiction galante (ou au prosimètre à la mode en France) pour créer des narrations complexes à la voix narrative instable et souvent ambiguë.

 

         Ce colloque accueillera toutes propositions (de préférence en anglais) sur la question du mouvement et de la mobilité, ainsi que des aspects novateurs de l'écriture de Behn, en particulier poétique, théâtrale ou romanesque. Ces propositions pourront aborder, sans s'y limiter, les questions suivantes :

 

  • représentation des mobilités géographiques et spatiales, y compris de l'errance et des mobilités forcées ; représentations de l'ailleurs, entre autres l'ailleurs impérial et la société coloniale ; représentation du commerce international et de la diplomatie, représentations du voyage, de la claustration, de la mobilité impossible ;
  • innovations de Behn par rapport aux traditions théâtrales et romanesques dont elle s'inspire ; phénomènes d’hybridité générique ;
  • conservatisme et innovation dans les représentations genrées ; transgressions et audaces dans les représentations des sexualités, de l'amour et du mariage ; la question de la transformation de soi et de la métamorphose ;
  • affirmation et hésitations de Behn dans sa construction d'une persona publique d'autrice, dans ses positionnements politiques ;
  • questions de la mobilité sociale et de ses limites ;
  • représentation de nouveaux objets comme la science et la curiosité ;
  • innovations dans les techniques dramatiques ; part donnée au chant et à la danse dans le spectacle ; gestuelle et la technique de l'acteur et de l'actrice ; modernisation de la diction…
  • Behn, la France, les Pays bas et la question de la mobilité linguistique ;
  • du côté de la réception, la question de la "modernité" de Behn dans les mises en scènes contemporaines, notamment son "féminisme" ;
  • innovations et nouvelles perspectives dans les Behn studies ; l’apport des études textuelles, des nouvelles archives, etc.

 

Afin d'allier théorie et pratique, le colloque sera accompagné d'une intervention théâtrale, proposée par les étudiant.e.s.

 

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